Journée Africaine de la détention provisoire : La déclaration de la CNDH

Journée Africaine de la détention provisoire : La déclaration de la CNDH

DECLARATION DE LA COMMISSION NATIONALE DES DROITS HUMAINS A L’OCCASION DE LA JOURNEE AFRICAINE DE LA DETENTION PROVISOIRE

A l’initiative du Réseau des institutions nationales africaines des droits de l’Homme (RINADH), le continent tout entier célèbre ce 25 avril 2022 la journée africaine de la détention provisoire. Cinquième du genre, cette commémoration s’inscrit en droite ligne de la Déclaration de Yaoundé adoptée le 23 Octobre 2015, lors de la dixième conférence biannuelle du Réseau.

L’institutionnalisation de cette journée vise à engager les Institutions nationales des droits de l’Homme (INDH) à davantage œuvrer en vue d’ »une réduction de l’usage excessif de la détention provisoire, y compris par la promotion des réformes juridiques et des politiques pénales sur : les alternatives à l’incarcération, les interventions para-juridiques, les avocats de garde à des postes de police, et l’évaluation de la détention préventive ». La détention provisoire désigne classiquement, la période de détention d’une personne ordonnée par une autorité judiciaire dans l’attente de son procès.

Les instruments de protection des droits humains consacrent le droit d’être jugé dans des délais raisonnables conformément aux dispositions des articles 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 7 de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples. Ces instruments prescrivent le caractère exceptionnel de la détention avant jugement, étant entendu que la liberté est le principe. Les États sont encouragés à apporter un encadrement législatif à la détention provisoire. Au Burkina Faso, la loi n°040-2019/AN du 29 mai 2019 portant Code de procédure pénale (CPP) a introduit des garanties qui limitent la détention provisoire à deux (02) ans au maximum en matière délictuelle, quatre (04) ans en matière criminelle, et instituent un contrôle judiciaire (articles 261-79 et suivants du CPP). Ces garanties en matière de détention provisoire se veulent respectueuses de la liberté tout en permettant un jugement des personnes détenues dans des délais raisonnables. La Commission tient à saluer ces avancées législatives.

Cependant, ainsi que le révèlent les statistiques de la Justice, le nombre de personnes en attente de jugement constitue toujours une part importante de l’ensemble des détenus. Ainsi en 2018, avant l’adoption du CPP, le nombre de personnes incarcérées en attente de jugement était de 2 866 sur un total de 7 812 détenus soit un taux de 36,68%. A la Prison de Haute sécurité (PHS), pour la même période, on dénombrait 540 détenus en attente de jugement sur un total de 667 détenus soit un taux de 80,95%.

En 2020, sur l’ensemble de la population carcérale estimée à 7401 individus, le nombre de détenus en attente de jugement était de 2670, soit un taux de 36,07%. A la PHS, sur la même période, ce nombre était de 853 sur un total de 914 détenus, soit un taux de 93,32%.

Le nombre de personnes en détention provisoire est demeuré constant pour la période considérée.  La proportion de personnes détenues provisoirement en lien avec des préventions d’actes de terrorisme demeure quant à elle préoccupante. La Commission nationale des droits humains (CNDH) s’en était du reste inquiétée dans son rapport annuel 2019-2020.

Le taux élevé des détentions provisoires contribue à la surpopulation carcérale et affecte ainsi les conditions de détention, le traitement des détenus, les conditions de travail des agents pénitentiaires tout en accroissant les risques de torture et autres actes assimilés.

Investie du Mécanisme National de Prévention de la torture, la CNDH entend œuvrer à la réduction des chiffres de la détention provisoire au Burkina Faso. Pour ce faire, elle s’attèlera à établir un dialogue constructif et permanent avec tous les acteurs concernés par la problématique dans le but de parvenir à un changement de paradigme sur la question. A terme, la synergie d’actions que nous appelons de tous nos vœux, permettra une amélioration substantielle des conditions de détention des personnes privées de liberté ainsi qu’un désengorgement de nos prisons.

Télécharger ici: Déclaration CNDH à l’occasion de la Journée africaine de la détention provisoire

Fait à Ouagadougou, le 25 avril 2022

Pour la Commission,

le Président 

Kalifa Yemboado Rodrigue NAMOANO

Chevalier de l’Ordre de l’Etalon

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